TAO et leadership : l’inspiration d’une sagesse millénaire

Que nous soyons directeur d’entreprise, responsable d’équipe, chef de famille, titulaire d’une classe, animateur d’une association ou simplement plein acteur de notre propre vie, nous sommes tous appelés à développer notre leadership. Pas toujours facile de trouver l’inspiration pour le faire de façon juste pour soi et pour les autres… Le Tao propose de trouver en soi ce juste équilibre.

Par Fabienne Doyen et Pierre Lucas, senior coachs  au BAO Group – photos Mathilde Troussard –modèle Augustin Cardyn.

L’heure n’est plus à la compétition, mais bien à la coopération. C’est un changement de paradigme qui se produit et se renforce d’année en année, notamment dans le monde du travail.  Pour survivre et se développer harmonieusement, les entreprises n’auront d’autre choix que de l’intégrer. Pas seulement dans leur politique de communication interne ou externe, mais surtout dans une prise en compte de l’individu et de ses relations qui modifiera sensiblement le quotidien professionnel de chacun. Lâcher la loi du plus fort pour laisser émerger le potentiel de chacun, trouver les synergies au-delà des différences, conjuguer les talents plutôt que pousser chacun au bout de ses ressources, lâcher les mécanismes de protection et partager le savoir, démontrer qu’ 1 +1 = 3 !
Et c’est par la sensibilisation des leaders de tous niveaux, avec une volonté authentique et sincère de changer en profondeur, que la transformation se fera (ou ne se fera pas). Cette aspiration de leur part devrait amener, au sein de toute entreprise, une reconsidération positive de toutes les forces vives, ainsi que de leur interdépendance. L’exemple vient du leader !
Or, pour l’heure, seule une minorité de patrons ou de responsables incarnent cette nouvelle vision du « bien diriger ». L’inquiétant phénomène « burn-out » et son cortège de dépressions, démotivations, bore-out et autres maux physiques ne cesse de croître. Et, même si ce n’est pas la cause unique, le type de leadership développé dans les organisations y est pour quelque chose.

Inutile de réinventer la roue

Même au travail, on peut se laisser inspirer par la philosophie et la spiritualité. Le Tao, par exemple, propose bien des réflexions pour nous guider à développer ce (self)management du 21e siècle, à développer la collaboration plutôt que la compétition. Cette philosophie chinoise de la « voie du milieu » prône une approche où les contraires se rassemblent naturellement, où les opposés se rejoignent dans une danse fluide, pour amener l’équilibre du vivant. À chacun de trouver en lui le juste chemin entre les extrêmes qui le régissent, notamment au niveau de son leadership.
Il y a près de 3.000 ans, Lao Tseu l’exprimait dans le 17e verset de son ouvrage fondateur, le Tao Te King :
« Quand le maître gouverne, les gens ont à peine conscience qu’il existe. À défaut, le mieux est un dirigeant qu’on aime. Puis encore, un qu’on craint. Le pire est un dirigeant qu’on méprise.
Si tu ne donnes pas de responsabilités aux gens, tu les rends irresponsables.
Le maître ne parle pas. Il agit. Quand son œuvre est achevée, les gens disent : ‘Regarde ! C’est nous qui l’avons fait, tout seuls !’ »
La Chine ancienne n’est pas la seule à montrer ce chemin. La plupart des sagesses traditionnelles rejoignent les pensées de Lao Tseu et nous pourrions chacun les faire nôtres, tant elles respirent le bon sens.  Mais alors comment se fait-il que tant de dirigeants et responsables soient si loin de cette sage évidence ?

Les bonnes raisons de ne pas y aller…

Beaucoup rétorquent: « J’aimerais bien, mais je n’ai pas le choix. Je suis moi-même soumis à une pression de ma hiérarchie (ou des actionnaires) qui me laisse une marge de manœuvre quasi nulle. Soit je suis le mouvement en gérant ma propre pression, fût-ce en niant mes valeurs profondes, soit je quitte le système… Ce qui n’est pas évident quand on a des charges de famille, un endettement conséquent,… De toutes façons c’est partout la même chose ! »
En coachant des dirigeants, nous nous sommes rendu compte que beaucoup nient la réalité et résistent tant bien que mal à la pression croissante, au prix de leur équilibre physique et psychique, ainsi que celui de leur entourage proche. Ce faisant ils restent complices – tout en lui payant un lourd tribut – d’un système absurde qui ne produit ni sens, ni bonheur, ni véritable richesse.
On a, il est vrai aussi, les responsables qu’on mérite : un chef indigne qui reste en place établit son pouvoir pour partie sur la faiblesse de ceux qui se reconnaissent en ce chef… Difficile alors de distinguer qui de l’œuf ou de la poule arriva le premier.
Une chose est certaine : de même que pour les individus dans leur vie personnelle, d’autres manières de voir et surtout de faire émergent dans le monde des entreprises. Certaines s’y sont lancées résolument et en récoltent les fruits : motivation, goût du travail, performances, chute de l’absentéisme, satisfaction et enrichissement personnel, ne plus se sentir « travaillant » mais plus heureux d’accomplir sa profession.

Alors, quelle serait la clé du changement ?

Laissons la parole à Socrate : « Connais toi toi-même et tu connaîtras l’Univers et les Dieux ». Plus facile à dire qu’à faire…. Se connaître soi-même n’est pas chose aisée. Le développement personnel est un travail sur soi, au moyen d’outils divers et variés, de plus en plus validés par le monde académique et médical. Et qui tend vers cet absolu ne manquera pas, à n’en point douter, d’évoquer la rencontre avec ses peurs les plus profondes, autant d’ombres plus confortables à éviter qu’à éclairer. Car il convient d’abord de les reconnaître et de les accepter.  Puis de comprendre les mécanismes psychiques subtils qui les ont déclenchées et nous poussent dans des stratégies de protection et de défense qui sont à terme – et paradoxalement – autodestructrices.
La plupart des organisations sont, via leurs membres, guidées par ces peurs, à tous les niveaux de responsabilités. Plus on monte dans le niveau de décision, moins les peurs sont liées à la pure « survie » matérielle. Elles deviennent existentielles, liées à l’identité ou au sens de la vie : besoin de reconnaissance, de contrôle, de pouvoir …
Pour s’en affranchir deux pistes s’offrent à nous: soit nier nos propres peurs et en faire payer le prix à ceux qui nous entourent par un jeu pervers de domination-soumission, soit y faire face et progressivement façonner notre esprit et nos actes au quotidien pour nous libérer d’un joug mortifère. Se libérer, c’est entrer dans un cercle vertueux, dont découle la libération des autres en lien avec soi. Travailler sur soi, c’est travailler pour les autres aussi. C’est à cela que sert le « développement personnel » dans sa plus noble finalité. Qu’il s’agisse d’enseigner à l’école, de diriger des équipes, ou de donner une direction à ses pairs, la première responsabilité qui incombe aux personnes qui occupent ces fonctions est de « s’ouvrir à soi » et de se connaître le mieux possible.

Montrer l’exemple

Laissons à nouveau la parole à Lao Tseu (versets 80 et 81) :
« Si un pays est gouverné avec sagesse, ses habitants sont satisfaits. Ils aiment travailler et ne perdent pas de temps à inventer des méthodes pour économiser leur temps… »
« Le Maître ne possède rien. Plus il fait pour les autres plus il est heureux. Plus il donne aux autres, plus il est riche. »
Il nous paraît de première importance que nos plus hauts dirigeants, quelle que soit l’instance qu’ils président, ouvrent avec un courage de pionniers cette voie tout autant nouvelle que profitable. Leurs collaborateurs les plus proches ne manqueront pas de sentir les tensions s’amoindrir et de recouvrer le goût du travail bien fait et gratifiant.
Oser d’abord le coaching pour soi, avant de le proposer aux autres, c’est entrer dans la conscience et la responsabilité de qui nous sommes et courir le risque - ou la belle aubaine - de corriger notre part dans un dysfonctionnement systémique et le rectifier pour ce qui nous incombe. À chacun de faire sa part dans son environnement, quelle que soit l’attitude des autres équipes ou des autres organisations. Et nous sommes convaincus que les leaders, quel que soit leur niveau de responsabilité, ont un rôle d’exemple à jouer dans ce processus. Comme un organisme vivant, une entreprise réclame un « cerveau », d’où émanent des ordres les plus justes pour le bien ou le mieux de l’ensemble de cette entreprise. Commencer le coaching par soi-même permet au dirigeant de sortir de sa tour d’ivoire, pour devenir le chef d’orchestre de musiciens tous plus attachés à jouer au mieux leur partition, et à la faire dans la joie.

L’année nouvelle qui approche est peut-être le moment idéal pour amorcer une nouvelle étape dans le développement de l’être unique que vous êtes, une remise en question personnelle, qui ne manquera pas de percoler dans votre organisation, quelle qu’y soit votre place… Avec nos collègues du groupe BAO, c’est ce que nous vous souhaitons de tout cœur pour 2016.

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